Maurice Mathis – Vie et Mœurs des Abeilles – Deuxième Partie – Chapitre 2

Journal détaillé d’une colonie d’abeilles en Tunisie.

 

Vie et Mœurs
des abeilles

publié en français
par Payot, Paris, 1951.
épuisé.
par le Docteur Maurice MATHIS
de l’Institut Pasteur de Tunis

 

DEUXIÈME PARTIE

 

Chapitre II.
Journal d’une petite colonie d’abeilles
pendant un an à Tunis

Dans le chapitre précédent nous avons donné le Journal de la colonie d’abeilles du Vivarium de Paris; dans celui-ci, nous relatons au jour le jour le développement d’une toute petite colonie, évoluant à Tunis.  On trouvera dans ce Journal nos observations, nos hypothèses, nos craintes, nos espoirs, nos interprétations du moment qui sont quelquefois exactes, le plus souvent erronées.  Pour que sa lecture ne soit pas trop fastidieuse, nous avons résumé l’ensemble des notes à la fin de chaque mois.  Depuis le moment où cette expérience a été conduite (novembre 42, novembre 1943) nous avons fait bien d’autres expériences, infirmant ou confirmant nos premières hypothèses, nous avons donc joint au texte un commentaire critique.  Chaque ligne représente souvent des heures d’observations, nous espérons que ce temps n’aura pas été consacré en vain à l’étude des abeilles.

Premier mois (du 7 novembre au 7 décembre 1942)

7 novembre. — Je prélève à 17 heures dans une ruche Langstroth en pleine activité, deux cadres couverts d’abeilles contenant des œufs, des larves et des nymphes operculées.  Je distribue aux abeilles du miel dilué autoclavé dont elles se gorgent immédiatement.  La ruchette contenant les deux cadres et les abeilles prisonnières sera placée en permanence dans une étuve obscure à 32°C.

9 novembre. — Distribution de miel autoclavé.  Les abeilles, sans reine ébauchent la construction de plusieurs cellules royales : calices de gland.

10 novembre. — Il y a encore dans les cellules des œufs non éclos; les larves à terme sont operculées; de jeunes abeilles éclosent; les larves en voie de développement ont un aspect brillant et paraissent humides; elles ont l’air en bon état.

11 novembre. — Distribution de miel autoclavé.  Il n’y a plus d’œufs; les abeilles poursuivent l’édification des cellules royales.

13 novembre. — Le matin, 5 cellules royales sont operculées, deux autres en voie d’achèvement; les abeilles ont donc pris en nourrissement des larves de quelques heures.  Quelques abeilles sont mortes dans le fond de la ruchette.

16 novembre. — Les abeilles dédaignent le miel distribué.  A midi, le temps étant très beau, je libère les abeilles.  Elles s’envolent en faisant un vol de repérage précis ; plusieurs défèquent massivement en plein vol; quelques-unes, à l’abdomen distendu tombent lourdement.  A 17 heures, toutes les abeilles sont revenues, je remets la ruchette à l’étuve à 32°C.  Plusieurs cellules de larves d’ouvrières operculées sont ouvertes par les abeilles; j’aperçois les têtes des nymphes ainsi désoperculées.  Une poignée d’abeilles mortes dans le fond de la ruchette.

17 novembre. — Les abeilles sont libérées de nouveau de 12 à 17 heures.  Défécations massives au vol.  Les abeilles dédaignent le miel dilué autoclavé qui leur est distribué; elles se groupent autour des cellules royales. [5 jours après l’operculation.]

18 novembre. — Je compte dans la ruchette 16 cellules royales.  J’en ouvre 10; les nymphes sont toutes au même stade de développement.  Dans les cellules ouvertes, il n’y a pas trace de gelée royale; dans l’une d’elle je découvre une chenille de la fausse-teigne, et, dans une autre des excréments caractéristiques de ce parasite.  Je dissèque une nymphe : l’abdomen est rempli de corps gras, dans le tube digestif aucune trace de pollen.  Les 9 nymphes restantes sont placées sur un papier buvard dans une boîte de Pétri; un coton mouillé maintient l’humidité sans les mouiller.

19 novembre. — La couleur blanche de quelques nymphes isolées vire au jaune.  La température est à 32°C.

20 novembre. — Je libère les abeilles, vol de défécation.

21 novembre. — Naissance de jeunes abeilles.  Quelques cadavres de nymphes d’ouvrières désoperculées sont expulsées au-dehors de la ruchette par les abeilles.  Les abeilles dédaignent le miel, par contre les jeunes s’en gorgent, pour ensuite l’offrir en ouvrant la bouche devant les autres.  Deux des nymphes royales de la boîte de Pétri remuent et déplient leurs ailes; leur abdomen est énorme; elles sont peu actives.

22 novembre. — Une reine naît dans la ruchette en découpant son opercule.  Les deux nymphes de la boîte de Pétri sont devenues des reines agiles.  Il y a donc eu identité de comportement dans la cellule royale et en dehors.

25 novembre. — Les abeilles libérées rapportent pour la première fois du pollen.

26 novembre. — Les abeilles font une sortie massive de 16 à 17 heures.  Elles dédaignent le miel dilué autoclavé et ne rapportent pas de pollen.

27 novembre. — Les abeilles sont libérées de 14 à 16 heures.  Il n’y a plus une cellule de couvain operculé.  Je distribue du sirop de sucre (concentration 700 grs par litre).

30 novembre, 1er, 3, 4, 5 décembre. — Les abeilles rapportent du pollen.

5 décembre. — Des 9 nymphes extraites des cellules royales, nous n’aurons que trois reines en bon état; de ces trois reines, deux sont incapables de voler, la troisième s’échappe, c’est la seule qui paraît normale.  Une mortalité considérable frappe les nymphes royales.

Les abeilles de la ruchette sont mises en essaim, les deux rayons de cire sont fixés dans deux cadres François Huber.  La colonie ainsi constituée occupe environ un litre.  Il y a environ 3000 abeilles et la reine vierge qui paraît en bon état.

OBSERVATIONS. — Au cours de ce mois, nous avons confirmé d’une manière précise l’édification des cellules royales et la naissance d’une reine, le « 8e jour après l’operculation de la cellule royale, soit le 16e jour après la ponte de l’œuf ».

Les abeilles peuvent être maintenues prisonnières au cours des premiers jours de l’élevage royal; elles ont d’abord absorbé le sirop de miel dilué autoclavé pendant deux jours, puis l’ont dédaigné.  Les premiers apports de pollen ont commencé 3 jours après la naissance de la reine.

Nous avons constaté la désoperculation de cellules contenant des nymphes et leur expulsion; comme cette désoperculation n’a pas touché toutes les cellules, nous sommes en droit de supposer que les nymphes désoperculées étaient malades.  Des 9 nymphes royales, une seule a évolué normalement, la mortalité est due à une cause inconnue que nous rechercherons par la suite.

CRITIQUE. — Nous n’avons pas compris à ce moment le rôle destructeur des chenilles de la fausse-teigne; pourtant nous en avons trouvé une vivante et les excréments d’autres.

Les nymphes royales sont très délicates à manier, il ne faut donc pas s’étonner que nous les ayons lésées en les sortant de leur cellule, surtout dans la région du moignon des ailes.

Les nymphes désoperculées et expulsées ont été tuées par les chenilles de la fausse-teigne qui existaient bien dans une ruche populeuse en pleine activité.

Deuxième mois (du 7 décembre 1942 au 7 janvier 1943)

7 au 11 décembre. — La ruchette est mise à l’étuve à 32°C, sauf pendant les quelques heures de la journée où nous laissons sortir les abeilles.  Une petite coupelle se trouve en permanence dans la ruchette avec du sirop de sucre.

12 décembre. — Première sortie de la reine vierge qui fait un vol de repérage de quelques minutes.  Elle est âgée de 20 jours.

13 décembre. — La reine sort pendant 25 minutes, elle revient non fécondée.  Les cellules des petits gâteaux de cire sont remplies de sirop dégorgé par les abeilles qui le pompent dans la coupelle.

14 décembre. — Pour activer la maturité sexuelle de la reine vierge, la ruchette st placée à l’étuve à 37°C pendant toute la nuit.  Au matin, trois abeilles mortes.  Temps superbe.  A 11 heures les abeilles sont libérées; elles rapportent du pollen.  Vers midi, la reine s’agite; à midi dix, elle sort; son absence dure 25 minutes; elle revient portant à son vagin entrouvert une masse blanchâtre (les organes génitaux du mâle qui l’a fécondée).  La reine est âgée de 22 jours.  Pendant toute la journée les abeilles sont très actives et récoltent du pollen.  Je place dans la ruche un tube Borrel (tube en verre cylindrique à fond plat de 4 cm de diamètre et de 8,5 cm de hauteur, servant en microscopie à colorer et décolorer les préparations) pouvant contenir 100 cc de sirop de sucre.

16 décembre. — Tout le pollen rapporté a été consommé pendant la nuit.

17 décembre. — Je place un deuxième châssis contenant un petit gâteau de cire avec quelques larves et des œufs, gâteau prélevé dans une autre colonie mais sans aucune abeille.  Les abeilles se portent immédiatement sur le couvain.  Elles continuent à sortir et à rapporter du pollen.

Vers midi, la reine s’agite de nouveau; elle sort un quart d’heure plus tard et s’envole sans le moindre repérage.  Une demi-heure plus tard, elle revient le vagin de nouveau entrouvert par une masse blanchâtre.  C’est sa deuxième fécondation.  La première n’a-t-elle pas été effective ?  Je suis perplexe [NB. En 1951, on n’avait pas encore découvert la fécondation multiple des reines au cours d’un seul vol nuptial.  Cette caractéristique ne fut décrite par le Dr J. Woyke qu’en 1955 — Multiple mating of the honeybee queen in one nuptial flight. Bull. Acad. Polon. Sci. Cl. 3(5): 175-180].  Elle est âgée de 25 jours; théoriquement, d’après les recherches de François Huber, elle ne doit pondre que des œufs parthénogénétiques.

Journée très belle.  Les abeilles rapportent du pollen en masse; elles ont pompé 100 cc de sirop de sucre.  Les larves du couvain ajouté ont un bel aspect et reposent sur un lit de gelée blanchâtre.

19 décembre. — Les abeilles sont libérées à 11 h 10; à 11 h 20, la première abeille revient avec son chargement de pollen : durée de la récolte 10 minutes.  De 12 h 10 à 12 h 20, je compte 35 abeilles avec des pelotes de pollen.

21 décembre. — J’aperçois un œuf qui disparaît par la suite.

23 décembre. — Ponte des premiers œufs de la reine.  Donneront-ils des larves d’ouvrières ou de mâles.

24 décembre. — Les abeilles sont bien groupées.  Dès que la ruche est mise à l’étuve à 37°C, elles se dispersent et ventilent activement.  Quelques-unes pompent le sirop de sucre.  Des larves du châssis ajouté le 17 décembre sont operculées, d’autres se développent normalement.  Quelques cellules remplies de miel sont operculées; c’est la première fois que les abeilles operculent du miel.  Jusqu’à ce jour elles se contentaient d’entreposer le sirop de sucre dans les cellules.  Des paquets d’abeilles construisent de petites cellules de cire; la reine circule au milieu de leur groupe.  Le pollen est consommé.

26 décembre. — J’examine les cellules entre les gâteaux de cire; elles contiennent des œufs et une jeune larve reposant sur un lit de gelée.  Quelques nouvelles cellules de miel sont operculées; le pollen est entièrement consommé; du 22 au 26, les abeilles ont pompé 400 cc de sirop de sucre (Voir la courbe).

27 décembre. — J’aperçois des œufs sur la face extérieure du gâteau de gauche.  Je marque une cellule contenant un œuf.  Le miel continue à être operculé dans quelques cellules.

29 décembre. — Les parois d’une cellule contenant une larve sont exhaussées, comme s’il s’agissait d’une larve de mâle.  Je suis fort perplexe.  Du pollen rouge est accumulé dans les cellules voisines de celles qui contiennent les œufs.  Le miel continue à être operculé.

30 décembre. — Les cellules aux parois exhaussées sont fermées avec des opercules bombés; il y a donc dessous des larves de mâles.  Les œufs du 27 sont couchés; dès qu’une larve naît, elle est immédiatement pourvue de gelée.

31 décembre. — Les deux cellules de mâles qui m’intriguent tant, sont désoperculées et les nymphes expulsées : ce sont des mâles.  D’où viennent-ils ?  Je n’en sais rien.  La reine pondrait-elle quelques œufs non fécondés ?

2 janvier. — Je distribue pour la première fois du sirop de sucre coloré légèrement au bleu de méthylène.

4 janvier. — Dans quelques cellules se trouve du sirop coloré en bleu-vert.  Par contre la gelée des larves est toujours blanchâtre.  Les jeunes abeilles du châssis ajouté le 17 décembre commencent à naître.  Les cellules contenant les larves issues des œufs pondus par la reine sont fermées avec des opercules plats.  La reine est donc fécondée normalement.  Je vois la reine au cours de ses déplacements abandonner un œuf; il est immédiatement dévoré par l’abeille la plus proche qui le détecte en le touchant de ses antennes.

5 janvier. — Les jeunes abeilles continuent de naître.  J’intercale un 3e châssis entre les deux autres; ce châssis est amorcé avec un petit rayon de cire naturelle construit en petites cellules.

6 janvier. — Dans les cellules de ce rayon les abeilles ont déposé du sirop coloré au bleu de méthylène et dans la partie centrale la reine a pondu pendant la nuit.  Au cours de la journée, les abeilles apportent du pollen qu’elles entreposent dans les cellules qui bordent celles qui contiennent les œufs.  Je vois une abeille dévorer directement le pollen aux pattes de celle qui l’a rapporté à la ruche.

OBSERVATIONS. — La reine en dépit du retard dans sa fécondation pond des œufs normalement fécondés; cette ponte suit de quelques jours le vol nuptial.  La reine a été fécondée deux fois.  Le premier accouplement devait être incomplet.

L’œuf abandonné par la reine a été dévoré par une abeille.  Elle aurait pu le porter dans une cellule.  Cette observation plaide contre le transport des œufs par les abeilles.

Le mois précédent les abeilles avaient absorbé une centaine de centimètres cubes de sirop de sucre; cette consommation est passée à 1 litre 400.  Le sirop coloré se retrouve dans les cellules, mais la gelée des larves ne l’est pas; il s’agit donc d’une sécrétion et non d’une régurgitation.

CRITIQUES. — Nous aurions dû ne pas ajouter un petit gâteau de couvain.  Nous avons souvent observé par la suite, à maintes reprises que les abeilles-ouvrières pouvaient pondre des œufs parthénogénétiques, même en présence d’une reine; les deux larves de mâles proviennent peut-être de tels œufs, mais nous n’en n’avons aucune certitude.

Troisième mois (du 7 janvier au 7 février 1943)

7 janvier. — La colonie possède des œufs, des larves qui reposent sur un lit de gelée, jamais colorée en vert, des cellules contenant du pollen et du sirop de sucre, une petite réserve de miel operculé.  La reine pond normalement, les abeilles sont actives, toutes les conditions sont réunies pour un développement normal.

8 janvier. — Les abeilles sont libérées.  La récolte du pollen se fait en 8 minutes au minimum.  Les abeilles sont très actives.

9 janvier. — L’examen des cellules du gâteau central montre la présence de jeunes larves en bon état reposant sur un lit de gelée.  Je marque sur la vitre avec précision quelques cellules contenant des larves.

10 janvier. — Les larves des cellules marquées ont disparu; elles ont été dévorées par les abeilles.  C’est la première fois que je note avec précision ce phénomène qui me paraît incompréhensible.  L’examen du cadre central montre un développement normal des larves.

11 janvier. — A 10 heures, je distribue du sirop coloré au rouge neutre; les abeilles semblent avoir quelque répugnance pour celui qui est coloré au bleu de méthylène.  A 14 heures, plusieurs cellules contiennent du sirop coloré en rouge.  J’ai l’occasion d’examiner la reine avec attention; elle est immobile juste derrière la vitre.  Elle a un abdomen normal, à peine plus long que celui d’une abeille ouvrière.

Je marque une cellule isolée contenant un œuf, et, à côté d’elle, deux autres cellules remplies de sirop rouge.

12 janvier. — La cellule contenant l’œuf est vide.  Qu’est-il devenu ?  Encore dévoré ?  La colonie a bel aspect.  Les larves de trois jours du gâteau central sont légèrement teintées de rouge; les cellules en bordure contiennent des larves plus jeunes et des œufs, d’autres du sirop bleu, jaune et rouge.  Pas trace de pollen.

Les abeilles sont libérées, elles rapportent du pollen.  A la fin de la journée, nouvel examen, pas trace de pollen, il est entièrement et totalement consommé.

13 janvier. — A 10 heures, j’observe la naissance des premières abeilles filles de la reine.  Celle-ci est constamment entourée « d’une cour d’honneur ».

14 janvier. — Temps magnifique, apports de pollen considérables.  Je déplace le châssis central ( n° 3) vers l’extérieur à gauche pour mieux suivre le développement des larves sans déranger les abeilles en ouvrant la ruche.  Les larves proviennent d’œufs pondus le 6 janvier.

15 janvier. — Quelques larves sont operculées.  Je note ce travail.  Il est effectué en un quart d’heure par une seule abeille.  La larve est encore lovée sur elle-même dans le fond de la cellule lorsque l’operculation commence.  Je distribue du sirop de sucre coloré à l’encre de Chine.

16 janvier. — Naissances de nombreuses abeilles, l’une d’elles est toute petite et paraît « rachitique ».  La reine pond immédiatement dans les cellules libérées par la naissance des abeilles.

Les petites larves des cellules en bordure du gâteau sont mortes, elles paraissent desséchées.  Je note un nymphe désoperculée.  Du sirop coloré à l’encre de Chine a été entreposé dans quelques cellules.

Les abeilles libérées ont une très grande activité.

17 janvier. — Apport de pollen.

18 janvier. — Les cadavres des larves desséchées ont disparu.  Le sirop coloré en vert a été entièrement repris et transformé par les abeilles.

20 janvier. — Distribution de sirop au rouge neutre.  Dissection de quelques abeilles et de grosses larves; présence des grains noirs de l’encre de Chine.

22 janvier. — Nouvelles dissections, l’intérieur des grains de pollen est coloré en rouge.

23 janvier. — Distribution de sirop coloré au vert de Janus, un peu plus tard je le retrouve dans les cellules.

26 janvier. — Naissance d’une abeille issue d’un œuf pondu dans la journée du 5 janvier, temps d’évolution 21 jours.

Apport considérable de pollen.

J’observe le manège d’une abeille chargée de deux pelotes de pollen; elle introduit une patte dans une cellule, puis avec l’autre détache la pelote; elle fait de même avec l’autre charge.  Elle se penche ensuite dans la cellule et y enfonce la tête.  Quand elle ressort, le pollen est bien tassé dans le fond de la cellule, il paraît tout humide.

27 janvier. — Les abeilles sont retenues prisonnières, une seule morte.

28 janvier. — Au matin, 3 mortes, ce qui fait 4 en 48 heures.  La ruchette est placée 2 heures à l’étuve à 37°C, les abeilles se dispersent sans aucune agitation; elles ventilent posément et énergiquement.

A 9 heures, je note dans une cellule deux œufs; à 17 heures, ils y sont toujours.

29 janvier. — Les deux œufs sont toujours là.  Je donne aux abeilles deux tubes Borrel remplis de sirop de sucre; dans l’un il est coloré au rouge neutre; dans l’autre à la teinture de tournesol.

30 janvier. — En 48 heures, 0 morte.  Le sirop de sucre des deux tubes est absorbé dans les mêmes proportions.  Un des deux œufs existe toujours, l’autre a donné naissance à une larve qui repose sur un lit de gelée blanchâtre.

Je constate que la gelée blanchâtre sur laquelle repose les larves devient transparente.  Naissance de jeunes abeilles.  Les deux tubes Borrel sont presque vides.

1er février. — L’œuf surnuméraire et la larve ont disparu.  Incompréhensible.

Si j’empêche les abeilles chargées de pollen d’entrer dans la ruche, elles meurent desséchées en quelques heures; leur survie est un peu plus longue, si je mets à leur disposition un peu de sirop de sucre.  C’est la faim ou la soif qui ferait revenir à la ruche, les abeilles récolteuses de pollen.

Le dégorgement du sirop de sucre se fait sur les parois internes des cellules, même dans celles qui contiennent une larve, il est repris par la suite.

Peu de naissances, la mortalité est considérable sans que je puisse me l’expliquer.

2 février. — A partir d’aujourd’hui, je distribue du sirop Codex pur [Sirop de sucre préparé par dissolution à froid et utilisé en pharmacie.  Il contient environ 1 kg de sucre cristallisé par litre].  Je note plusieurs cellules contenant des œufs et des larves.

4 février. — Tous les œufs et les larves ont disparu.  Je donne du pollen aux abeilles; elles le picorent.  C’est la première fois que je vois des abeilles avides de pollen à ce point.  Elles ont à nourrir de très nombreuses larves.

5, 6 et 7 février. — Les abeilles sont actives et rapportent du pollen.

OBSERVATIONS. — Au cours de ce mois, notre attention a surtout été attirée par le nombre considérable d’œufs et de larves qui disparaissent dévorés par les abeilles.  Pour quelle raison ?

Les abeilles qui reviennent à la ruche chargées de pollen meurent en quelques heures, si elles ne peuvent se gorger d’eau sucrée ou de miel.

Du 13 décembre au 13 février, soit en deux mois nous avons compté 89 abeilles mortes dans la ruche, mais combien vont-elles mourir dehors ?

CRITIQUES. — Le sirop de sucre distribué massivement en dehors de toute miellée naturelle serait peut-être bien la cause de la mort des larves.  Pour éclaircir ce point il faudrait peut être nourrir les abeilles avec du miel.

Quatrième mois (du 7 février au 7 mars 1943)

8 février. — Je note la disparition de nombreuses larves logées dans les cellules du pourtour des gâteaux de cire.

9 au 11 février. — Rien à signaler.  A cette date, les abeilles construisent de nouvelles cellules de cire blanche et la reine y pond immédiatement.

23 février. — J’aperçois l’ébauche d’une cellule royale, le calice de gland de Réaumur.  La reine a un abdomen volumineux.  J’ajoute un 4e cadre portant une grande plaque triangulaire de cire gaufrée.  Les abeilles sont mises à l’étuve à 35°C.

24 février. — En une nuit, toutes les parois de toutes les cellules de la cire gaufrée sont exhaussées.  Apport de pollen.

25-26 février. — Les cellules de la cire gaufrée sont remplies de sirop coloré.

27 février. — Ponte de quelques œufs, les cellules voisines sont remplies de sirop.

2 mars. — La cire gaufrée est moins résistante que la naturelle; les cellules hexagonales se déforment lentement, s’étirent vers le bas.

3 mars. — Je mets à la disposition des abeilles deux tubes Borrel : l’un est rempli de sirop Codex pur, l’autre de sirop dilué au tiers.

4 mars. — Les abeilles ont pompé la totalité du sirop et les deux tiers du sirop dilué.  Elles vont donc de préférence vers les concentrations les plus élevées.

6 mars. — Dès qu’elles sont libérées, les abeilles expulsent les cadavres et les portent en volant à plusieurs dizaines de mètres, quelquefois plus de cinquante mètres.

OBSERVATIONS. — Beaucoup de jeunes larves et d’œufs disparaissent.  La population augmente, mais pas comme elle devrait le faire.  Je pense que de nombreuses jeunes abeilles périssent en dehors de la ruche.

Rapidité de l’édification des cellules sur la cire gaufrée.

Le miel operculé apparaît rouge sous la pellicule de cire blanche.

Cinquième mois (du 7 mars au 7 avril 1943)

7-9 mars. — Les abeilles sortent et rapportent du pollen probablement du nectar; elles pompent régulièrement le sirop de sucre.  Les cellules bâties sur la cire gaufrée sont operculées en partie, dans la portion supérieure; dans la moyenne, elles se distendent de plus en plus.  La cire gaufrée n’a pas les mêmes propriétés mécaniques que la cire sécrétée directement par les abeilles.

12 mars. — La ruchette est placée quelques heures à 37°C., le rayon de cire gaufrée se rompt au niveau des cellules non encore operculées.  Il se maintient vertical, je le laisse.  Les abeilles sont agitées, elles pompent le miel répandu.  Je me repens d’avoir mis la ruchette à l’étuve.

13 mars. — Tout le miel a été récupéré; nombreuses naissances de jeunes abeilles; la colonie augmente sensiblement.

14 au 22 mars. — Rien à signaler.

23 mars. — En examinant une cellule de couvain dont l’opercule présente un petit trou, je vois la tête d’une chenille de la fausse-teigne.  Les abeilles ébauchent le calice de gland d’une nouvelle cellule royale.

26 mars. — Très nombreuses naissances.  Les abeilles ont abandonné la cellule royale.

30 mars. — J’aperçois la reine; elle a l’abdomen allongé, presque effilé.  Les gâteaux de cire des quatre châssis atteignent la partie inférieure de la ruchette.  La colonie occupe un volume de 6 à 7 litres; chaque cadre compte environ 4.500 cellules, au total 18.000.  L’augmentation me paraît dérisoire depuis le 23 février.

6 avril. — J’ajoute un châssis avec une feuille de cire gaufrée.  La température extérieure est très douce, nous sommes en plein printemps.  La ruchette sera laissée en permanence en dehors de l’étuve.

OBSERVATIONS. — La mortalité des jeunes abeilles doit être considérable, si nous en jugeons par la faible augmentation de la colonie, en dépit des miellées naturelles et du sirop de sucre distribué.

CRITIQUES. — Nous ne faisons pas assez attention à la présence de cette chenille de la fausse-teigne.  Comment est-elle venue dans la ruchette ?  Il doit y en avoir bien d’autres.

Sixième mois (du 7 avril au 7 mai 1943)

7 avril. — Toutes les parois des cellules de la cire gaufrée ont été exhaussées pendant la nuit, comme dans le châssis précédent.

8 avril. — En prévision de l’augmentation de la population, j’ajoute un sixième châssis.  L’essaimage naturel bat son plein dans les colonies du rucher à l’extérieur.

10 avril. — Les abeilles sont très actives; elles apportent du pollen en masse et pompent de grandes quantités de sirop de sucre.  Le nombre des abeilles n’augmente pas comme je le prévoyais.

14 avril. — Un petit rayon de cire est commencé dans le 6e châssis.  Présence d’œufs dans les cellules de la cire gaufrée du 5e châssis.  Sortie massive de jeunes abeilles en même temps faisant leur vol de repérage.

18 avril. — Continuation du gâteau de cire du 6e châssis.  La reine y pond.

25 avril. — Ponte des œufs parthénogénétiques; résultat déduit de l’apparition des mâles qui éclosent le 20 mai.

26 avril. — Grosse activité, mais le nombre des abeilles n’augmente pas.  Je constate de nombreux manques ou trous au milieu du couvain operculé, ce qui est la preuve d’une grosse mortalité des larves.

1er mai. — Les abeilles ont toujours une très grande activité.  Le cadre n° 6 est bâti aux quatre-cinquième; ses cellules sont remplies de nectar.  Beaucoup de jeunes abeilles ne doivent pas revenir.

3 mai. — Nouvelles sorties des jeunes abeilles.

4 au 7 mai. — Malgré les apports importants de pollen, de nectar, la colonie n’augmente pas.  Elle me paraît lamentable.

OBSERVATIONS. — La remarque la plus importante de ce mois, c’est la très faible augmentation de la colonie en abeilles, alors qu’elle devrait être de plusieurs milliers par jour.  La saison est cependant favorable, depuis le 5 avril nous avons capturé plusieurs essaims naturels.  La mortalité des abeilles est mystérieuse, le fait est cependant incontestable.

CRITIQUES. — Cette disparition des abeilles est due à la fausse-teigne.

Septième mois (du 7 mai au 7 juin 1943)

8 au 10 mai. — Apports de pollen, pas de miel operculé.

13 mai. — A partir de cette date nous distribuons le sirop Codex en le comptant par litre.

19 mai. — Gros apports de pollen.  Présence d’œufs dans les cellules extérieures du 6e châssis.

20 mai. — J’aperçois le premier mâle.  L’œuf a du être pondu le 25 avril.  Gros apports de pollen.

21 mai. — Eclosion des larves issues des œufs pondus le 19; elles reposent sur une abondante gelée blanchâtre.  Augmentation de la ponte.

22 mai. — Du 18 au 22, les abeilles ont pompé un litre de sirop Codex.

25 mai. — Quelques larves sont operculées ainsi que des cellules de miel.

1er juin. — Quelques abeilles font la barbe au dehors de la ruche.  Un gâteau de cire se rompt.  La pellicule de cire du miel est très fine.

6 juin. — Très gros apports de pollen.  Du 22 au 26 mai, un litre de sirop est pompé ; de même du 26 au 31, et du 31 au 5 juin.

7 juin. — Naissances de jeunes abeilles dont les œufs ont été pondus le 19 mai, soit 20 jours.  Il y a un raccourcissement qui doit correspondre à l’élévation de la température extérieure.

OBSERVATIONS. — Très faible augmentation de la population.  La reine qui est née en novembre a déjà fait une ponte parthénogénétique, c’est contraire aux observations de François Huber.

Huitième mois (du 7 juin au 7 juillet 1943)

9 juin. — Je note avec précision un certain nombre de larves reposant sur leur lit de gelée.

10 juin. — Toutes les larves ont disparu.

13 juin. — Les abeilles apportent du pollen, les pelotes sont très grosses mais informes.  Les abeilles travaillent mal.

20 juin. — Le miel est operculé partout.

22 juin. — J’ajoute un 7e cadre.

23 juin. — Au cours de la nuit, les abeilles ont sécrété un petit rayon d’une demi main.  Les cellules ont des pans grossiers qui sont polis par la suite.  Quelquefois, le fond d’une cellule est humecté de liquide, mais ce liquide s’évapore par la suite.

29 juin. — Agrandissement du rayon.  Il y a de petites et de grandes cellules, elles sont remplies de sirop, pas un œuf.

30 juin. — J’ajoute deux châssis nouveaux.  Ruche à 9 cadres.  Les abeilles se massent en paquets, mais ne sécrètent pas de cire.  Il a été distribué : du 5 au 10 juin, un litre de sirop; de même du 10 au 13; du 14 au 18; du 18 au 26; du 26 au 2 juillet.

OBSERVATIONS. — La colonie stagne sans se développer.  Depuis le 13 décembre, la colonie a reçu un total de 22 litres de sirop de sucre, son volume ne dépasse pas 18 litres.

CRITIQUES. — Cette distribution massive de sirop de sucre prouve bien que rien ne saurait remplacer le nectar naturel pour le développement d’une colonie d’abeilles.

Le ralentissement de l’activité de la colonie est en rapport avec l’élévation de la température extérieure.

Neuvième mois (du 7 juillet au 7 août 1943)

8 juillet. — Les petits rayons construits dans les deux derniers châssis n’augmentent pas et la reine ne vient pas y pondre.

9 juillet. — Examen général, de la colonie.  Très peu de couvain.  Je capture la reine, elle est petite, maigrichonne, et chose curieuse, elle ne peut pas voler.  Je réduis la colonie en enlevant deux cadres remplis de miel operculé représentant 3 kg.

13 juillet. — Cette opération a réveillé les abeilles, elles sont de nouveau actives et apportent du pollen en masse.  Une cellule royale est operculée (4e jour).

21 juillet. — Naissance d’une reine qui détruit les autres cellules royales.

2 août. — J’aperçois 4 mâles.  Il y a 24 jours que la colonie a été orphelinée.

4 août. — Je vois une très belle reine d’une belle couleur dorée, ses ailes sont en parfait état.  Elle est âgée de 14 jours.

OBSERVATIONS. — La diminution du nombre des abeilles peut être la conséquence d’une maladie qui frapperait les abeilles et particulièrement à mon insu.

CRITIQUES. — En réalité, et nous en avons eu confirmation toutes les années suivantes, à partir du mois de juin en Tunisie les abeilles entrent plus ou moins en diapause estivale.  La température extérieure trop élevée et le degré hygrométrique ne permettent plus un développement normal du couvain dans les petites colonies ce qui est notre cas.

Il me semble également que la ruchette était trop exposée aux rayons solaires.

Dixième mois (du 7 août au 7 septembre 1943)

10 août. — J’aperçois trois œufs pondus dans les cellules du gâteau extérieur gauche.  Reprise de l’activité avec des apports de pollen.

11-12 août. — Le nombre des œufs augmente; j’en compte jusqu’à 4 ou 5 par cellule.  Les abeilles ébauchent des cellules royales.  La ruche est probablement orpheline.  A vérifier.

16 août. — Quelques larves se développent.

19 août. — Beaucoup de larves disparaissent.  Je remarque qu’elles présentent sous la peau de petites taches comparables à « des taches de bougie ». Les larves ne sont pas operculées, elles ont un retard de 24 h.

20 août. — L’opercule des larves est bombé.  Ce sont des mâles issus d’œufs parthénogénétiques pondus par les abeilles, devenues pondeuses par suite de la disparition de la reine.  La population décroît très nettement.

21 août. — Quelques larves de mâles sont operculées dans des cellules qui se rapprochent un peu des cellules royales, mais plus allongées.  François Huber les avait signalées.  Beaucoup de larves meurent.

28-29 août. — Attaque massive de la colonie par des chenilles de la fausse-teigne; par suite de la dépopulation les abeilles ne peuvent plus se défendre.  Les fourmis se mettent également de la partie.  Jusqu’à ce jour, elles ne s’étaient jamais manifestées.

30 août. — Je réduis la colonie à trois cadres, je lui donne un cadre de couvain sans abeille prélevé dans une autre colonie.  Au cours de l’opération, je capture la reine.  Elle est petite, maigrichonne, son corps est tordu, sa 3e patte droite est tordue et paralysée; elle vole à peine, après quelques battements d’ailes, elle retombe sur le sol.

Dissection :

  • oviductes sans développement
  • spermathèque vide de spermatozoïdes
  • tube digestif normal.

4 septembre. — Les abeilles sont redevenues actives, elles ont operculé une petite cellule royale et en terminent une seconde.  De très nombreuses nymphes d’ouvrières sont désoperculées.

6 septembre. — Entre 12 et 14 heures, operculation de la deuxième cellule royale.  Dans une cellule, j’aperçois plusieurs œufs, les abeilles ont repris leurs pontes parthénogénétiques.

OBSERVATIONS. — Nous trouvons ici un bel exemple de la ponte des abeilles.  Les trois conditions sont réunies : absence de la reine (ou reine non fonctionnelle), température élevée (le mois de septembre est un des plus chauds en Tunisie), nourriture abondante.

Pourquoi la reine est-elle devenue si petite ?

CRITIQUES. — L’élevage des reines ne doit pas se faire sans des conditions précises et une population importante.  La saison actuelle ne convient pas du tout à cause de la chaleur.

La belle reine que nous avions vue a dû partir ou périr au cours de son vol nuptial.  La reine maigrichonne est probablement une des dernières nées, sa paralysie de la 3e patte est la suite d’un combat avec une autre reine.  Cette paralysie s’est étendue jusqu’aux ailes d’où perte de la faculté du vol.

Le cadre de couvain prélevé dans une autre colonie présente de nombreuses nymphes désoperculées, il était donc infesté de fausse-teigne.

L’attaque massive de la fausse-teigne prouve bien qu’elle était présente et a miné la colonie.  Nous n’avions pas compris à l’époque toute l’importance de ce parasite.

Onzième mois (du 7 septembre au 7 octobre 1943)

9 septembre. — Très nombreuses nymphes désoperculées et rejetées hors de la ruche.  La colonie très faible est de nouveau attaquée par les fourmis.

25 septembre. — Je nettoie de nouveau la ruche pour la débarrasser des chenilles de la fausse-teigne qui grouillent par centaines.

27 septembre. — Je capture une reine, elle est âgée de 15 jours.  Elle vole, mais difficilement.  Les abeilles expulsent des nymphes de mâles désoperculées, mais elles sont de plus en plus inactives et inertes.

La population est réduite à quelques milliers d’abeilles.

OBSERVATIONS. — Nous assistons à la dépopulation progressive d’une colonie frappée de maladie.

CRITIQUES. — Il n’y a pas de maladie à proprement parler, mais, parasitisme intense par les chenilles de la fausse-teigne.  De plus nous avons fait travailler les abeilles à contretemps, à une période où normalement en Tunisie, elles sont au repos.

Douzième mois (du 7 octobre au 7 novembre 1943)

7 au 17 octobre. — Les abeilles sont toujours aussi inertes, ne faisant aucun cas du sirop de sucre.

18 octobre. — Je vois un petit mâle seul survivant des centaines d’œufs pondus par les abeilles.  La reine est de petite taille, elle est incapable de voler.  Je l’enlève de la colonie.

Je donne aux abeilles un nouveau cadre de couvain (nombreuses nymphes désoperculées) prélevé dans une colonie puissante.

20 octobre. — Les abeilles reprennent leur activité; elles pompent le miel de quelques cellules intentionnellement désoperculées.  Elles rapportent du pollen ce qu’elles n’avaient plus fait depuis longtemps.

25 octobre. — Abeilles très actives, apport de pollen.  Les larves se développent normalement.  Deux cellules royales, trois ébauches.

26 au 29 octobre. — Tout le couvain étant operculé les abeilles redeviennent inactives.  Elles couvent avec soin les cellules royales.

31 octobre. — A 10 heures, j’aperçois une reine bien conformée.  Une cellule royale laisse pendre un opercule bien découpé, tenant encore par quelques fils de soie.  Deux autres cellules royales ont été éventrées, dans l’une j’aperçois une nymphe, l’autre est vide, mais je retrouve la nymphe expulsée dans le fond de la ruche.

1-2 novembre. — Les abeilles sont de nouveau actives; elles sont brillantes, ont un bel aspect.  Apport de pollen.  Le sirop de sucre est de nouveau pompé.

3 novembre. — Les abeilles sont calmes.  Reprise de la ponte des abeilles pondeuses en présence de la reine encore vierge.

4 novembre. — Les œufs se dessèchent, la population est trop réduite.

5 novembre. — Plusieurs cellules contiennent des larves reposant sur un lit de gelée blanchâtre.

6 novembre. — Les abeilles se groupent bien.  La reine est âgée de 6 jours.

7 novembre. — Les abeilles sont de nouveau actives et apportent du pollen…

OBSERVATIONS. — Nous retombons sur des observations déjà faites à plusieurs reprises, notamment la, ponte des abeilles ouvrières.

Conclusions générales

observation pendant une année de cette petite colonie, constamment surveillée, mise à l’étuve tous les soirs pendant plusieurs mois, nourrie avec la plus grande sollicitude, nous a permis de préciser un certain nombre de points obscurs de la biologie des abeilles : orphelinage, édification des cellules royales, fécondation, développement embryonnaire, larvaire, nymphal, naissance et travail des jeunes abeilles, sécrétion de la cire dans certaines conditions, transformations du nectar ou du sirop de sucre en miel operculé.

Deux notions capitales se détachent de l’ensemble de ces observations : le rôle du couvain, les ravages de la fausse-teigne.


publié en français
par Payot, Paris, 1951.
épuisé.
par le Docteur Maurice MATHIS
de l’Institut Pasteur de Tunis