L’élevage apicole,
une science, un art
(Titre original : Bienenzüchtungskunde)
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par le Professeur Ludwig Armbruster Theodor Fisher Verlag 1919 Adaptation française et commentaires par Jean-Marie Van Dyck Jemeppe-sur-Sambre, Belgique 2000 |
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l’étrange généalogie de l’abeille.
Dans le chapitre précédent, nous nous étions déjà fortement rapprochés de la théorie. Toutefois, avant d’examiner à fond cette théorie de l’hérédité, nous allons d’abord considérer l’étrange arbre généalogique de l’abeille.
Si l’on utilise le terme étrange pour qualifier cet arbre généalogique, c’est parce que nous savons que le mâle provient d’un œuf qui aurait pu aussi bien donner naissance à un individu femelle, s’il avait été fécondé. Il est normal que le profane comprenne difficilement que les œufs d’abeille se développent aussi bien avec que sans fécondation. Des savants, spécialistes de la question, s’y sont longtemps heurtés. La résistance de certains apiculteurs est donc compréhensible. En fin de compte, ce n’était pas plus mal : plus la résistance était obstinée, plus cela contribuait à l’étude et au renforcement de cette étrange découverte.
Les phénomènes de l’hérédité chez l’abeille ont confirmé cette découverte et les éleveurs de reines noires qui obtiennent des reines multicolores seront facilement convaincus de son exactitude. L’apiculteur peut observer tous les jours des faits qui ont joué un rôle important dans la découverte des lois de l’hérédité. Voyons cela d’un peu plus près.
Chez les animaux domestiques [NdTr: et chez l’homme], chacun possède 2 parents, 4 grands-parents, 8 arrière-grands-parents et 16 arrière-arrière-grands-parents. Chez l’abeille, le mâle, le faux-bourdon, n’a pas de père : il n’a donc qu’un seul „parent“ — comme disent les généticiens — sa mère; et il n’a que 2 grands-parents, les parents de sa mère. Il n’a que 3 arrière-grands-parents et 5 arrière-arrière-grands-parents. L’abeille femelle (qu’elle soit reine ou ouvrière) a réellement 2 parents, mais seulement 3 grands-parents, 5 arrière-grands-parents et 8 arrière-arrière-grands-parents. La moitié donc de ce que l’on trouve chez l’animal domestique normal. Le mâle, lui, n’a même pas le tiers de ces arrière-arrière-grands-parents.
Chez l’abeille, les arbres généalogiques des mâles et des femelles diffèrent par conséquent très fortement. Et l’un comme l’autre divergent des arbres généalogiques classiques dont nous allons parler maintenant.
La „Deutsche Gesellschaft für Züchtungkunde“ (Société allemande de l’Elevage) a suggéré, pour tous les élevages, l’introduction généralisée des tableaux généalogiques de la forme présentée ci-dessous. Il s’agit dans l’exemple détaillé ici de l’arbre généalogique de l’étalon Pantaléon. Les ancêtres de cet étalon se succèdent de gauche à droite : d’abord les deux parents, le père en haut, puis les 4 grands-parents, les 8 arrière-grands-parents, etc. La disposition par paires des animaux successivement croisés est facilement visible. Le mâle est toujours en haut, la femelle en bas. Puisque, contrairement à ce qui existe chez l’abeille, on peut croiser plusieurs fois un même individu avec d’autres différents, un animal peut se retrouver à plusieurs reprises dans le même arbre. Les juments jouent ici, contrairement à l’abeille, le plus faible rôle. Plusieurs de ces juments n’ont même pas de nom. Il est facile de montrer qu’il s’agit d’un élevage apparenté — croisement d’animaux ayant un lien de parenté. Pour les animaux qui se apparaissent plusieurs fois dans le même arbre généalogique, on utilise pour plus de clarté des couleurs ou des signes particuliers, comme par exemple pour Eclipse un .
Table 1. Pedigree de l’étalon Pantaléon d’après Wilsdorf 1912. |
Les éleveurs de jadis, et aujourd’hui encore les éleveurs profanes, considèrent, conformément à l’opinion générale, le „sang“ comme responsable de la transmission des qualités (apparentement par le sang). On dit donc que l’étalon Pantaléon est demi-sang de son père Castrel et demi-sang de sa mère, la jument Idalia. Ou par Musidora qui a reçu le quart de chacun de ses grands-parents, donc 1/4 de Eclipse et 1/4 de Highflyer, etc. La fille anonyme de Alexander a aussi reçu les 2/4 de son sang de ses deux grands-pères Eclipse et Highflyer, comme Musidora. Par conséquent, cette dernière correspondrait exactement à la fille anonyme de Alexander pour les 2/4 de son sang. Les deux parents de notre Pantaléon auraient donc la même fraction de sang de ce couple particulier (Eclipse–Highflyer). La mère, Idalia apporte 2/8 de son sang de Highflyer, 1/8 de Eclipse, donc 3/8 de la paire en question. C’est la signification des fractions inscrites dans le tableau. Les numérateurs correspondent au nombre de fois où intervient un ancêtre ou un couple commun, le dénominateur [dans le cas où on n’a pas simplifié la fraction] le nombre de générations qui se sont succédées depuis l’intervention. Il est clair que cette mathématique n’est utile que dans une certaine mesure. Mais la représentation sur laquelle elle est basée à l’origine est tout à fait douteuse (elle est partiellement abandonnée à l’heure actuelle, mais pourrait refaire surface très facilement). Même si les mieux informés ne peuvent croire que le sang soit le siège des mécanismes de l’hérédité, ils pourraient peut-être admettre plus facilement que les fractions venant du père et de la mère sont miscible comme l’on peut mélanger deux cuillères de liquide quelconque. Et ils accepteraient encore plus volontiers des mécanismes de transmission tels que, par ex., le père–étalon est capable de distribuer chacune des fractions qu’il a reçues, très précisément, comme les différentes parties d’un médicament complexe, bien mélangé par le pharmacien. Ce ne sont bien sûr que des hérésies.
L’arbre généalogique de l’abeille diffère fortement de celui des autres animaux d’élevage, parce que les faux-bourdons n’ont ni père, ni fils (ils n’ont qu’un seul grand-père, des filles mais pas de fils, seulement des petits-fils), et parce que les reines n’ont qu’un mari, et inversement [NdTr. En ce point, le Professeur Armbruster se trompait, car en 1919, les fécondations multiples des reines — de 15 à 25 maris découvertes en 1955 par le Dr Jerzy Woyke et déterminés par la biologie moléculaire — n’avaient pas encore été découvertes. Les retours successifs de reines portant chaque fois le signe de fécondation, connus au moins depuis François Huber, laissaient alors supposer que la fécondation précédente avait échoué, comme cela se passait aussi souvent avec les autres animaux domestiques. Par contre, le „inversement“ est tout à fait correct : les mâles ne servent qu’une seule fois.]
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tableau généalogique de l’abeille.
Ces arithmétiques avaient pris un départ prometteur avec le développement des idées du médecin Francis Galton (1822). Nous n’en parlerons que très brièvement car elles font forte impression sur le profane et circulent encore de nos jours parmi les différents éleveurs, entre autres les éleveurs d’abeilles (par ex. Heyl 1918). Les particularités des nouvelles lois de l’hérédité nous paraîtrons d’autant plus claires, comparées aux anciennes considérations sur le sujet.
Fig. 2. Présentation démodée des influences héréditaires de la parentèle (2 et 3 = les parents, 4–7 = les grands-parents, etc.). D’après Galton dans Goldschmidt. |
Dans le schéma carré ci-contre on a représenté la totalité des facteurs héréditaires d’un individu. On a présenté en 2 et 3 les parts égales de ses deux parents — son père et sa mère — (chaque part constitue la moitié de l’ensemble des facteurs héréditaires); de 4 à 7 nous trouvons les contributions de ses 4 grands-parents; de 8 à 15 celles de ses 8 arrière-grands-parents; etc. Donc, par exemple, tous les arrière-grands-parents seraient représentés par des cote parts fortes. Les propriétés héréditaires de cet individu seraient, comme qui diraient, jouées aux dés entre les différentes possibilités héréditaires de tous ses ancêtres (même si les ancêtres les plus éloignés ne contribueraient que pour une part proportionnellement moindre).
De nouveau, la représentation incorrecte entraîne que les facteurs héréditaires sont comparés à des liquides parfaitement miscibles dont chaque individu apporte une dose. Chaque dose est quantitativement semblable aux autres. Quelque chose (appelé plus haut „partie de facteur héréditaire“) est transmis avec cette dose aux enfants et petits-enfants, naturellement en concentration proportionnellement de plus en plus faible.
Tous ces nombreux ancêtres d’un individu n’ont certainement pas été tous „réussis“ ni tous également „ratés“. Dans l’ensemble, leur „moyenne“ de bonne qualité aura été „modérée“, chacun ayant été héréditairement équipé avec cette „moyenne d’ancêtre“. Cet équipement est donc complexe et fait que cet individu, d’après ses bons et ses mauvais cotés se distingue donc par sa moyenne tout à fait particulière et personnelle.
fig. 3. tableau généalogique d’une abeille femelle. signe d’une reine, signe d’un mâle. |
Outre sa représentation fondamentalement incorrecte, il n’est pas possible d’appliquer à l’apiculture ce schéma de Galton et le tableau généalogique standardisé de la „Deutsche Gesellschaft für Züchtungkunde“ qui s’en inspire. L’abeille est en effet un cas particulier et l’on devrait tout modifier comme cela a été réalisé dans le tableau de la Fig. 3.
Ce tableau généalogique est asymétrique. Le mâle d’abeille a une ascendance beaucoup plus faible derrière lui. Heyl 1918 semble d’avis qu’il joue un moindre rôle dans l’hérédité de l’abeille. C’est assez manifeste dans cette représentation : le nombre d’ancêtres restreint du mâle ne peut pas, pour ainsi dire, remplir aussi richement son réservoir de facteurs héréditaires, que le plus grand nombre d’ancêtres de la reine. En fait, les choses se comportent tout à fait différemment, beaucoup plus simplement, mais pour le comprendre, nous devrons attendre la discussion sur les bases mendéliennes de l’hérédité (voir la leçon 39)
Les tableaux généalogiques habituels ne peuvent pas servir de modèle pour les arbres généalogiques de l’abeille.
publié dans Abeilles & Cie, N°78 (Sept-Oct) 2000, 10-14, |
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par Jean-Marie Van Dyck, Jemeppe-sur-Sambre, Belgique |
10bis |
mâle d’abeille dans la généalogie.
Les cours de Ludwig Armbruster se suivent donc et je ne manquerai pas de faire part de leurs traductions dès que possible. Cependant, comme l’affirme le Prof. Armbruster, cette représentation prête à confusion car elle suggère que chaque ancêtre apporte une même part que les autres parents du même niveau. Cela n’est correct que pour les parents directs, pas pour les grands-parents, arrière-grands-parents, etc. Revoyons donc ce chapitre à la lumière de la génétique moderne:
Chaque abeille femelle, reine ou ouvrière, a reçu de ses deux parents, sa mère et l’un des maris de celle-ci — l’un des mâles qui l’ont fécondée peu après sa naissance —, une double série de chromosomes (2×16 ou 16 paires) chargés de tous les gènes spécifiques à cette espèce, une série de l’un des parents, une série de l’autre : 50 % de chacun de ses parents, donc. Et de ce fait, tous ces gènes s’y retrouvent en double exemplaire. Certains sont identiques l’un avec l’autre (homozygote), certains sont différents, tous les deux plus ou moins efficaces, parfois tout à fait inefficaces (hétérozygote). Cette différence est source de diversité, mais peut aussi cacher des lacunes, des déficiences létales. Ces déficiences ne sont pas directement visibles car elles sont plus ou moins compensées par les gènes homologues corrects.
Fig. 3bis. Nouvelle conception d’un tableau généalogique pour une abeille femelle. |
Lors de la production de l’œuf (ovule qui, non fécondé, donnera le mâle), la réduction chromosomique va laisser s’effectuer un choix pour chaque chromosome : un seul de chacun des couples sera présent. Cette réduction va avoir deux conséquences importantes :
D’abord, l’élimination de la moitié des chromosomes présents, indépendament de leur origine, paternelle ou maternelle. Il sera donc impossible de connaître le pourcentage de gènes venant de la grand-mère ou du grand-père et donc à plus forte raison, de chacune des générations précédentes.
Pour que l’ovule — et le mâle qui en sortira, puisqu’il naîtra d’un ovule non fécondé — soit viable, il faut que tous les gènes soient corrects. Pour que le mâle puisse produire une fécondation et atteindre une reine, il faudra, en plus, qu’il possède au mieux tous les caractères liés aux performances de vol et que l’odorat et la vue soient les meilleurs.
Il est donc possible de reconsidérer le tableau généalogique à partir de la caractéristique du mâle d’abeille : il provient d’un œuf non fécondé, un ovule mûri chez sa mère. Dès lors, comme il ne possède qu’une seule série de chromosomes, les millions de spermatozoïdes qu’il va élaborer seront tous rigoureusement identiques, contenant ce seul ensemble de chromosomes. Le mâle pourrait donc n’être considéré que comme un multiplicateur et inséminateur pour tous les caractères héréditaires contenus dans l’ovule dont il est sorti. Il ne serait donc, avec ses frères, que l’un des éléments copulateurs de la reine qui les a conçus.
publié dans Gemeinschaft der Buckfastimker e.V., Zuchtregistratur 1993, p 73, avec leur permission. |
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adaptation française par Jean-Marie Van Dyck, Jemeppe-sur-Sambre, Belgique |
10ter |
arbre généalogique en pratique.
Dans sa représentation détaillée, l’arbre généalogique utilisé par le Frère Adam s’accorde parfaitement avec le tableau généalogique ci-dessus. On obtient ainsi la représentation qui suit :
Un arbre généalogique tel que celui illustré ici donne une vue complète des paramètres de l’élevage. Les lignées maternelles et paternelles sont présentées complètement sur le même nombre de générations, bien que la plupart des gènes transmis par la lignée paternelle ne semblent pas posséder la même importance que ceux transmis par la lignée maternelle, en tout cas à la première génération. [NdTr. cette faible importance est probablement due à une inhibition des informations transmissibles (gènes) „féminines“ chez le mâle et sa descendance directe par le phénomène appelé empreinte génétique ou empreinte génomique. C’est cependant de ces gènes que devraient dépendre les caractéristiques de la colonie, entité typiquement „femelle“. Ils ne s’exprimeront réellement qu’à la génération suivante, mais ne joueront plus alors qu’un rôle beaucoup moindre.]
Voici les conventions utilisées dans cette représentation tout à fait particulière de l’arbre généalogique :
La reine B123 et ses sœurs sont des filles de la reine B428 (B: dont les caractères sont reconnus Buckfast et qui fut testée dans la ruche 428), et de T301, code des mâles avec lesquels elle a été fécondée. fécondée au cours de la saison 1986, dans le cadre protégé de la station de fécondation de Sherburton, par des faux-bourdons (abeillaux, mâles, drones) issus des filles de la reine B182, donc petits-fils de cette reine B182. Attention B182 n’est pas le code du père de B123, mais de ses maris. Le code du père de B123 est T301, maris de B428. |
Un arbre généalogique sur plusieurs générations prend donc rapidement beaucoup d’espace (voir un exemple plus complet : l’arbre généalogique de la reine B-281 [!fichier PDF de 103 ko]. Cette reine est la fille de B-217, l’une des reines concernée par le pedigree ci-dessus, fille de B123 et qui fut fécondée en 1989 par les mâles, petits-fils de l’anatolienne A-322).
La notation suivante, utilisée par le Frère Adam, est plus concise. Du fait de l’élimination des données paternelles secondaires, il devient possible de suivre plus longuement la lignée maternelle.
Voici par exemple, le …
Pedigree 1988
[ Original du Frère Adam ]
Reproductrice Buckfast n°
B-123 = .86 – B-428 shr B-182 : .84 – B-387 shr T-301 : .82 – B-272 shr B-132 : etc. (cf. Frère Adam)
Ce qui signifie en clair :
Les reines issues de la lignée B-123 ont été fécondées en 1988 par des mâles issus de filles de B-137, donc ses petits-fils, voir ligne ci-dessous | La reine B123 est l’une des descendantes de B428; elle fut fécondée en 1986 par des petits-fils de la reine B-182 | La reine B-428 est l’une des descendantes de B-387; elle fut fécondée en 1984 par des petits-fils de la reine T-301, une reine de type cecropia athos | La reine B-387 est l’une des descendantes de B-272; elle fut fécondée en 1982 par des petits-fils de la reine B-132 |
Mâles : filles de B-137 dans le site protégé de Sherburton
B-137 = .84 – B-361 shr T-301 : .82 – B-272 shr B-132 : .80 – B-265 shr B-129 : etc. (cf. Frère Adam)
Cet exemple est typique : il montre la manière dont le Frère Adam a introduit la lignée Athos dans sa lignée Buckfast : l’introduction s’est faite par les mâles petits-fils de T-301; les deux sœurs Buckfast B-387 et B-361 ont ici été retenues pour cette introduction. La première a permis l’émergence de la lignée B-428, et la seconde, de B-137. Le mariage décrit par ce pedigree de 1988 constitue donc un recroisement destiné à consolider les caractères découverts chez l’une et chez l’autre.
Remarquons que dans la notation initiale du Frère Adam, seul le numéro de la ruche tient lieu de code pour chaque reine. Quand il commence à importer des reines du bassin méditerranéen, il fait précéder ce code d’une lettre correspondant à la variété d’abeille importée. Ainsi apparaissent les lettres G (grecque), A (anatolienne), E (égyptienne), T (grecque de la presqu’île Athos) et S (saharienne) ainsi que M (monticola). En 1963, il commence à déclarer B (buckfast) les souches qui rassemblent toutes les qualités requises par ses exigences (à un niveau suffisant). C’est ainsi que la A-391 qui servit d’éleveuse à Buckfast en 1979 fut reconnue B (B-391) est fut utilisée de nouveau comme éleveuse, à ce titre, en 1980.
Reconnaissons cependant que, depuis la mondialisation de l’abeille Buckfast, et le nombre de plus en plus important d’éleveurs qui suivent les indications du Frère Adam, cette représentation a tendance à devenir insuffisante. Sauf quelques exeptions pendant les années 50, le Frère Adam n’a utilisé qu’une seule station de fécondation, au lieu-dit Sherburton, dans le Dartmoor (Lande de la rivière Dart, qui arrose l’abbaye). Et les importations qu’il a effectuées ont toujours été limitées soit à des reines fécondes soit à des œufs. Ce matériel d’élevage, pour autant qu’il ait satisfait aux exigences du sélectionneur, était exclusivement destiné à servir de tête de lignée.
A l’heure actuelle, les stations de fécondations reconnues se comptent par dizaines — stations sur îles, stations de haute montagne, stations de campagne dans des zones protégées, stations sur digues de mer, etc. Il me semble donc utile et même nécessaire de voir apparaître sur le pedigree, non seulement le nom de la grand-mère des maris, mais aussi le lieu ou le mode de fécondation des diverses reines. En effet, il est indispensable de faire la différence entre les fécondations naturelles et les inséminations dont le nombre, vu la confiance qu’elles permettent, ne fait qu’augmenter.
D’autre part, il a rapidement paru évident que l’identité de l’éleveur devait apparaître dans le code — le nom — de chaque reine. Les apiculteurs des pays nordiques ont d’abord attribué aux éleveurs un numéro de code „01“, „02“, etc., mais ces codes n’étant pas assez mnémoniques, tous ont adopté ensuite des initiales, deux généralement, parfois trois. Ces codes se mettent, selon les régions, soit devant le code de la reine (au Nord), soit derrière celui-ci (zone alémanique), entre parenthèses. Il m’a semblé raisonnable de ne pas mettre de code quand il s’agit d’une reine du Frère Adam, mais, pour ma part, je les identifie en plaçant tout simplement un tiret entre le code de la race et le numéro d’ordre de la reine. Cette forme d’écriture rend implicite l’appartenance de ces reines à l’élevage du Frère Adam.
Pour la compréhension parfaite des mouvements d’un pedigree, il est intéressant de justifier les transferts de propriétaires en indiquant le mode d’importation du matériel transféré. Je veux dire que deux catégories de transferts sont possibles :
- soit l’acquisition d’une reine féconde, dont les caractéristiques, fournies obligatoirement par l’éleveur, sont …
- le code de la mère, ayant fourni les œufs pour l’élevage;
- le code de la grand-mère des maris utilisés pour la fécondation.
- Je conseille dans ce cas le code „imq“ ou „iiq“ (import of mated or inseminated queen – reine féconde ou inséminée importée), devant les caractéristiques de cette reine
- soit l’obtention de tout autre matériel – œufs, larves, cellules royales mûres ou reines vierges.
Dans ce second cas, il me semble que l’on peut être tout à fait explicite en décrivant les importations comme suit : „ieg“ pour des œufs, „ilv“ pour des larves, „imc“ pour des cellules mûres et „ivq“ pour des reines vierges. Dans ce cas l’éleveur qui fournit le matériel ne doit donner que les caractéristiques de la mère, la fécondation se faisant sous la responsabilité de celui qui emporte le matériel.
Je suggère donc la représentation suivante pour les pedigrees des deux anatoliennes ci-dessus. Le premier a été complété jusqu’en 1963, date de l’importation de la reine A-416 du Frère Adam qu’il reçut, féconde, de Turquie.
Pedigree 1988
Reproductrice Buckfast n°
B-123 = .86 – B-428 shr B-182 : .84 – B-387 shr T-301 : .82 – B-272 shr B-132 :
.80 – B-265 shr B-129 : .78 – B-135 shr B-282 : .76 – B-366 shr B-427 :
.73 – A-200 shr B-233 : .70 – A-163 shr B-421 : .68 – A-149 shr G-425 :
.65 – A-133 shr B-255 : .63 – A-416 shr B-436 : imq .62 – pure Sinop (anatolica)
Mâles : issus de filles de B-137 dans le site protégé de Sherburton
B-137 = .84 – B-361 shr T301 : .82 – B-272 shr B-132 : etc. (cf. Frère Adam).
Cela se lit … En 1988, on a utilisé à l’abbaye la reproductrice de variété buckfast numéro B-123 : née en 1986, c’est la fille de la buckfast B-428 fécondée à la station de Sherburton par les mâles, petits-fils de la buckfast B-182; cette B-428, elle-même la fille, née en 1984, de la buckfast B-387 fécondée à la station de Sherburton par les mâles, petits-fils de la cecropia Athos T-301; … etc.
publié sur Internet, en Avril 2017. |
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par Jean-Marie Van Dyck, Jemeppe-sur-Sambre, Belgique |
10quater |
Pedigree de la colonie.
Toutes les explications faites jusqu’ici n’ont considéré que le pedigree de la reine, la reine vierge, indépendamment de sa spermathèque.
Or ce que nous observons, ce dont nous notons les caractéristiques, les qualités, ce ne sont ni les reines, ni les mâles, c’est la colonie habitée par cette reine.
Ce sont les abeilles, fille de la reine, qui déterminent les caractéristiques de la colonie. Voyons donc ce qu’il en est de l’état de cette colonie sur le tableau repris ci-contre.
Sur ce tableau on ne dit rien des moyens de fécondation de la reine B217. On ne peut donc pas parler de sa colonie puisque l’on ne sait rien de ses „maris“. Par contre, on a des renseignements sur ses deux „parents“ :
- La colonie-mère est la colonie B123 qui est réellement représentée par la zone colorée en jaune. B217 a reçu de la reine B123 un ¦uf qui a été fécondé avec du sperme représenté dans le rectangle jaune gauche. En fait cet ¦uf a été fécondé par un seul des „maris“ de la reine B123.
- La colonie-père est la colonie B182 dont les mâles produits pas plusieurs de ses filles sont représentées dans ce même rectangle jaune de gauche. Si le nombre de filles de B182 est en nombre suffisant, les mâles produits par ces filles représentent parfaitement la biodiversité de la colonie B182.
D’après „Die Ahnentafel der Biene“, dans Bienenzüchtungskunde, le livre du Prof. Ludwig Armbruster, 1919, p 19, et dans „Aufbau einer Ahnentafel“, dans Gemeinschaft der Buckfastimker e.V., Zuchtregistratur 1993, p 73, avec leur permission |
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