Conduite des ruchers à lAbbaye de Buckfast
Compte-rendu de lexposé du Frère ADAM au Congrès de Cassel,
le 4 Septembre 1960
Extrait de La Belgique Apicole , |
suite
|
Traduction et adaptation française (Belgique) |
RENOUVELLEMENT DES REINES
A ce propos, le Frère Adam a publié, début des années 50, un très intéressant article où il expose son opinion sur la délicate introduction des reines.
Le changement général des reines est effectué, chez nous, en mars pour la raison quà cette date, il nécessite un minimum de travail et ne produit aucune diminution indésirable de la force de la population, ce qui ne serait pas le cas si cette opération avait lieu en été.
Une reine atteint sa pleine formation et sa plus grande productivité dans lannée suivant sa naissance. Vraisemblablement, son plein potentiel de ponte nest pas acquis dès lété au cours duquel elle est née. Cette affirmation soulèvera peut-être des doutes. Mais notre exploitation avec ses ruches spacieuses et sa miellée tardive dautomne nous apporte toujours la preuve de son exactitude. Lintroduction, à cette époque de lannée, dune reine préalablement éprouvée et qui, de plus, se trouve dans la pleine force de sa jeunesse, exige avant tout le développement de la population depuis le printemps.
Je ne voudrais pas laisser limpression que nous ne renouvelons les reines quau mois de mars. Certes, elles le sont en général à cette saison. Mais pour certaines ruches, la nouvelle reine ne leur sera donnée quau moment où cela apparaîtra nécessaire. En cas de besoin, quand notre réserve de reines de lété précédent est épuisée; nous sommes contraints dutiliser des reines nouvellement fécondées, malgré les difficultés dintroduction. Au cours de ma carrière dapiculteur, jai fait lessai de toutes les méthodes connues dintroduction des reines; aucune ne ma donné toute garantie de sécurité et ce sont précisément des reines récemment fécondées qui sont généralement vendues et introduites, malgré les grandes pertes éprouvées.
De nouvelles recherches ont confirmé lexactitude de la théorie que javais primitivement avancée. On cite souvent la haine de races comme cause déchecs dans ladmission dune nouvelle reine; pour ma part, je nen ai jamais eu la preuve. Mais il nest pas douteux que les jeunes reines de certaines races se montrent plus nerveuses et provoquent ainsi plus aisément une attitude hostile des abeilles en sorte quelles courent le risque, à tout moment, dêtre tuées par elles. En fait, ceci est une preuve complémentaire de lexactitude de mon opinion en cette matière.
En résumé, lacceptation dune nouvelle reine ne dépend pas tant dune odeur, mais de son comportement. Une reine complètement formée, en ponte depuis un certain temps, se montre plus tranquille; elle peut être introduite en toute sécurité, sans quil soit nécessaire de recourir à toutes les précautions préalables qui ont été jusquà présent, jugées indispensables. Louverture de la ruche peut, toutefois, mettre sa vie en danger. Mais peu de semaines suffisent à modifier radicalement son comportement; sa démarche sera moins rapide, plus pondérée, plus digne dune matrone; ses réactions seront plus calmes, plus mesurées. Après quatre semaines de ponte, elle atteindra sa pleine maturité, sinon son maximum de ponte, qui ne se produira quau cours de lannée suivante, comme je lai déjà dit. Le délai de quatre semaines, que jindique pour sa maturité, doit être quelque peu allongé pour les reines qui sont nerveuses de naissance, par suite de leur race, ainsi que pour certaines reines bâtardes; mais daprès mon expérience, ce retard ne dépasse pas deux mois dans les cas extrêmes.
Un procédé dintroduction de reines donnant toute garantie de sécurité est dune nécessité absolue pour toute exploitation apicole.
Par lopération complète de renouvellement, les deux tiers de nos ruches de rapport sont dotées dune jeune reine. Les meilleures des reines de deux ans sont laissées provisoirement à leur peuple et, au début de mai, plusieurs dentre elles sont livrées à des instituts, sociétés ou éleveurs professionnels en vue de la reproduction.
DEVELOPPEMENT DES POPULATIONS
Après égalisation, nos colonies couvrent, fin mars habituellement, sept cadres Dadant. Le taux moyen de leur croissance dépend plus ou moins des conditions de la récolte sur la bruyère au cours de lautomne précèdent. Lors des années de miellée totalement déficitaires, on peut prévoir le prochain effondrement du chiffre de la population ainsi quil en fut en 1947, année au cours de laquelle nos ruches, après égalisation, avaient à peine quatre cadres dabeilles. Dailleurs, il nest pas désirable que la population saccroisse au maximum à cette époque de lannée, car nous navons pas de miellée notable au printemps. Une ruchée de moyenne force à cette saison aura un développement meilleur pour atteindre son maximum au moment de la grande miellée.
Tout apiculteur expérimenté sait que souvent un nucleus de lannée précédente se développe mieux et donne une meilleure récolte quune ruche qui est trop populeuse dès le début du printemps.
Après légalisation des populations et le renouvellement des reines, nous ne touchons plus aux ruches jusquà la mi-avril. Si le temps est défavorable, elles sont maintenues sur un nombre limité de cadres. Dans le cas contraire, on ajoute un cadre et dix jours après, un deuxième. Lélargissement est ainsi poursuivi graduellement jusquà la fin de mai ou le début de juin, date à laquelle chaque ruche dispose de son plein de douze grands cadres.
CADRES BATIS OU DE CIRE GAUFREE
Chaque population doit bâtir chaque année un minimum de trois cadres; ils sont toujours placés du côté extérieur, près de la partition ou de la paroi de la ruche. Nous nexerçons aucune contrainte sur les abeilles qui doivent spontanément en entreprendre la bâtisse. Sauf rare exception et passagèrement, nous ne plaçons jamais le cadre de cire gaufrée au milieu des autres cadres, pas plus que nous ne procédons à une limitation ou une translation de couvain ainsi que cela se pratiquait autrefois en Angleterre.
Jai dit, tantôt, que nous ne plaçons les cadres à bâtir au milieu des autres quà titre exceptionnel. Normalement, ils sont suspendus aux côtés des cadres garnis de couvain; ce placement peut être effectué à tout moment sans trouble dans le développement de la population et sans inconvénient pour la cire bâtie. Chacun sait ce quil arrive lorsque, en absence de miellée, les cadres de cire sont introduits au milieu du couvain. Dailleurs, lexploitant dun grand rucher na pas la possibilité de donner les cadres à bâtir au moment le plus favorable pour chacune de ses ruches; aussi les place-t-il sur les côtés dès quil en a le loisir. Ainsi les abeilles pourront y accéder et les bâtir à volonté et ces cadres seront mieux construits. Mais il nen est pas toujours ainsi avec des abeilles de race bâtarde. Elles gâcheront les cadres placés à la périphérie du nid à couvain en y établissant des cellules de mâles en trop grand nombre; par contre, si ces cadres sont suspendus entre les cadres de couvain, ils seront très bien bâtis en cellules douvrières. Aussitôt quils seront achevés, il faudra les transposer sur les côtés de la ruche, ce qui nécessitera un surcroît de travail. Mais, avec les abeilles bâtardes, cest la seule possibilité.
LE NOURRISSEMENT
Daprès ce que nous avons dit précédemment, maints de mes auditeurs auront deviné que, chez nous, il nest pas question de nourrissement stimulant. Cest exact. Dans le temps, ce nourrissement était considéré comme indispensable; on commençait très tôt à le fournir : dès la Noël, chaque population recevait sa petite boîte de « candi », sucre en pâte dune confection spéciale. Des compléments de une à deux livres se succédaient jusquà la fin de février. A cette date, on donnait chaque soir du sirop de sucre chaud en petites doses. Jai aussi pratiqué ce sport. Aujourdhui, il nen est plus question, sauf en cas de nécessité absolue. Je ny recours dailleurs quà mon corps défendant. Le nourrissement administré en avril ou mai provoque la construction en excès de cellules de mâles et lélevage de faux-bourdons.
Cela nempêche que, parfois, il faut bien y recourir au cours des années de disette où le nourrissement simpose pour garder les populations en vie.
PLACEMENT DES HAUSSES
Nos ruches reçoivent leur première hausse à la mi-mai, au temps de la floraison des pommiers, donc avant que le nid à couvain contienne le nombre plein de ses cadres. Si nous attendions le moment où toutes nos ruches auraient leurs douze cadres, une tendance à lessaimage apparaîtrait dès la fin de mai. Par contre, en plaçant une hausse dès que les abeilles couvrent neuf cadres, le développement de la population se poursuit sans interruption.
Nous utilisons des grilles à reine de fabrication particulièrement solide. Auparavant, pendant de nombreuses années, nous ne faisions pas usage de grilles; mais nous avons constaté quelles présentaient plus davantages que dinconvénients.
Comme nous lavons dit, chaque ruchée doit construire, au cours de lannée, un minimum de trois grands cadres de cire gaufrée. La première hausse est, si possible, garnie de quelques cadres bâtis, à défaut avec toute cire gaufrée. Nous estimons que les abeilles doivent beaucoup bâtir. Le renouvellement périodique de la cire des cadres du bas des ruches est dune nécessité absolue pour la prévention des maladies des abeilles.
SURVEILLANCE DES RUCHERS
Notre méthode exige une surveillance sévère des ruches de rapport pendant la période de croissance de la population et le temps de lessaimage. Depuis la fin mars jusquà la fin de juin, il ne se passe pas deux semaines sans que je prenne le pouls du degré de développement de la colonie. Ce contrôle périodique est indispensable pour vérifier les qualités de ponte de chaque reine. Au cas où lune delles ne satisfait pas à nos exigences, elle est remplacée sans pitié.
Pendant la période dessaimage, la visite des ruches est opérée chaque semaine. Depuis la fin de juillet, après lenlèvement des deux cadres de cire bâtis, plus aucune inspection nest effectuée jusquau moment du dernier contrôle avant la mise en hivernage. Sauf au temps dessaimage, une visite de ruche ne dure pas plus de quelques minutes : un regard sur les deux ou trois premiers cadres de couvain suffit, le plus souvent, pour nous donner les indications nécessaires.
Extrait de La Belgique Apicole , |
A suivre
|
Traduction et adaptation française (Belgique) |