Réflexions sur les allèles sexuels

Bienenzüchtungkunde von Prof. Dr Ludwig Armbruster, 1919 – Kapitel 25 & 26

 

Réflexions sur les allèles sexuels

 

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Publié en danois dans
Krydsnings- og kombinationsavl
med honningbien
,
1996, s. 39-43
Cours d’élevage des reines,
par Hans Røy,
Ringkøbing,
Danemark
Adaptation française,
février 2013,
Jean-Marie Van Dyck
Jemeppe-sur-Sambre
Belgium

Génétique de la détermination du sexe

Il est notoire que travailler en vase clos (milieu fermé), sans addition de matériel nouveau, peut être inadéquat après un certain nombre de générations.  Cela se voit dans le fait que nous obtenons ce que nous appelons du « couvain lacunaire ».  Un tel couvain n’est pas uniformément operculé, la surface comporte un grand nombre de trous.  Le même phénomène peut être observé dans de petites populations pures, comme chez la noire, l’abeille nordique (A.m.m.) sur l’île Læsø, la noire bretonne sur l’île d’Ouessant, ainsi que pour l’abeille ligurienne de l’île Kangaroo.

Allèles sexuels (gènes du sexe)

La raison de ces différents niveaux de manque d’utilisation parentale (érosion génétique) dans les petites populations isolées, comme dans les lignées créées en utilisant la consanguinité, est une conséquence de la différenciation sexuelle génétiquement déterminée et spécifique à certains insectes, y compris les abeilles.

En plus du sexe, résultat du fait qu’un ovule soit fécondé ou non, il existe également une détermination génétique du sexe en ce sens qu’un œuf fécondé peut aussi se développer en mâle diploïde.  De tel mâles diploïdes sont reconnus, mais ne sont pas acceptés par les abeilles et sont éliminés au premier stade larvaire.  C’est pour cette raison qu’apparaît le couvain lacunaire.

Le nombre d’allèles sexuels dépend de la race et de la lignée.  On a pensé, dans un premier temps, qu’il en existait une douzaine.  Ensuite on en a dénombré 19.  À présent, il est admis qu’il pourrait y en avoir beaucoup plus.  Mais dans les petites populations isolées, et dans nos lignées reproductrices il semble y en avoir beaucoup moins.

Les différents allèles d’un locus X peuvent se désigner comme suit :

Xa,   Xb,   Xc,   Xd,   Xe,   Xf, …etc.

Les reines (et les ouvrières) portent toujours deux allèles sexuels différents.  L’un venant de la mère elle-même, l’autre venant de l’un de ses « maris » (sperme de la spermathèque).
Un mâle ne peut posséder qu’un seul allèle sexuel, l’un des deux différents de sa mère.  Une reine va donc produire deux types de mâles dont une moitié possède l’un des allèles sexuels et l’autre moitié l’autre.

Si l’on accouple une reine portant les allèles sexuels Xa & Xb (soit la reine Xa-Xb), avec un mâle portant l’allèle Xc, les œufs fécondés porteront soit la combinaison Xa-Xc, soit la combinaison Xb-Xc, et tous les œufs se développeront normalement.

Xa-Xb Xc Xa-Xc Xb-Xc
× => &
Fig. 6.  — Un accouplement normal, sans problème.

Mais si l’on accouple une même reine Xa-Xb avec un mâle portant par exemple, l’allèle Xb, la moitié des œufs se développeront en mâles diploïdes et le couvain lacunaire sera de 50%

Xa-Xb Xb Xa-Xb Xb-Xb
× => &
Fig. 7.  — Un accouplement consanguin, couvain lacunaire.

Allèles sexuels et consanguinité

Il n’est pas tout à fait correct d’assimiler une érosion génétique sur les allèles sexuels avec une consanguinité excessive.  Mais il est clair qu’un haut taux de couvain lacunaire est un des symptômes de consanguinité.
Le but principal des travaux de sélection étant exclusivement l’augmentation de la production de miel, nous avons perdu un grand nombre d’allèles sexuels dans nos stocks reproducteurs.  Le fait mérite de nous y intéresser un peu plus.  On sait déjà que différentes lignées (souches génétiques) peuvent être très productives malgré un taux de couvain lacunaire de 5 à 25 %, mais ce sera toujours un handicap physique pour ces colonies fécondes et vitales.

Allèles sexuels dans une population libre

Le nombre des différents allèles sexuels présents dans une population libre peut être calculé assez facilement par comptage et calcul du pourcentage de destruction par les abeilles des mâles diploïdes dans leur premier stade larvaire — très peu de temps après l’éclosion de l’œuf.

Pour faciliter ce travail, on présente à la reine un rayon bâti libre.  Il faut que ce rayon soit entièrement édifié dans la région qui sera plus tard prise en compte.  Un travail correct consistera à vérifier et noter la zone de ponte (soit par une photo, soit par une feuille de journal déployée sur la tête du cadre) dessiner la zone avec un marqueur, dater et cocher le cadre.

Onze à 12 jours après la ponte (pas plus tard car les cellules de remplacement seraient alors également operculées), compter les cellules non-operculées sur une zone faite au moyen d’un cache sous la forme d’un parallélogramme contenant 100 cellules (10×10) ou 225 cellules (15×15).  Ce travail est très avantageusement facilité par l’utilisation d’une photo.  Ne pas ommettre de déduire le nombre de cellules non-pondues au départ (pollen, nectar ou autre).

Dans une population libre, les reines s’accouplent avec des mâles de l’endroit, ce qui fournira le nombre des allèles sexuels trouvés dans la population de la colonie (les deux de la reine et ceux de chaque mâle =1 par mâle d’origine différente) : ce sera généralement un petit nombre.  C’est à travers les résultats d’un couvain moyen que l’on peut effectuer le calcul.  Plus de colonies seront analysées et plus on s’approchera de la réalité qui sera la valeur maximale obtenue.

La survie des populations, leur biodiversité dépend du nombre d’allèles sexuels différents contenus dans le sperme accumulé dans les spermathèques des reines et donc du nombre de mâles d’origines différentes qui se seront accouplés avec les reines.  On peut relier la biodiversité à la richesse en allèles sexuels différents car si une diversité existe pour ces gènes particuliers, elle existera aussi pour les autres caractères plus difficilement accessibles.

Comme mentionné plus haut, chaque reine porte, par définition, deux allèles sexuels différents, nous pouvons choisir de les appeler Xa et Xb, les cellules reproductrices (gamètes ou ovules ou œufs non fécondés) contiendront alors soit Xa ou soit Xb.  Par contre, les mâles, provenant d’un œuf non fécondé, ne portent chacun qu’un allèle sexuel parmi les allèles sexuels présents dans la population, appelons-les Xa, Xb, Xc, Xd … Xn et ainsi de suite.  On y met, bien sûr, les deux allèles de la reine puisqu’elle provient d’un élevage local.

Si nous envisageons la combinaison de 2 allèles (Xa et Xb => reine Xa-Xb et mâles Xa et Xb) les œufs fécondés possibles seront, du point de vue sexuel, Xa-Xa, Xa-Xb, Xb-Xa et Xb-Xb .  Si l’on a 3 allèles, les combinaisons seront Xa-Xa, Xa-Xb, Xa-Xc, Xb-Xa, Xb-Xb et Xb-Xc.  Si 4 allèles sont disponibles, les combinaisons seront Xa-Xa, Xa-Xb, Xa-Xc, Xa-Xd, Xb-Xa, Xb-Xb, Xb-Xc et Xb-Xd.  Dans chacun des cas, seules deux combinaisons de la larvette seront détectées par les nourrices qui les dévoreront (Xa-Xa et Xb-Xb).  Et ainsi de suite, on obtient le tableau ci-dessous :

Exemple de survivance avec 2 allèles sexuels de mâles, identiques à ceux de la reine.

♀ => Xa & Xb
♂ => Xa Xb Xc Xd Xe Xf Xg Xh Xi
génomes
produits
Xa-Xa
Xb-Xa
Xa-Xb
Xb-Xb
Xa-Xc
Xb-Xc
Xa-Xd
Xb-Xd
Xa-Xe
Xb-Xe
Xa-Xf
Xb-Xf
Xa-Xg
Xb-Xg
Xa-Xh
Xb-Xh
Xa-Xi
Xb-Xi
allèles diff. 2 2 3 4 5 6 7 8 9
rapport 1/2 2/4 2/6 2/8 2/10 2/12 2/14 2/16 2/18
survi­vantes = ♀ 50% 50% 67% 75% 80% 83% 86% 88% 89%
éliminées 
♂ diploïdes
50% 50% 33% 25% 20% 17% 14% 12% 11%

Si la reine n’a en commun qu’un seul allèle sexuel avec les mâles qui l’ont fécondée, on a les résultats suivants :

♀ => Xa & Xw
♂ => Xa Xb Xc Xd Xe Xf Xg Xh Xi
génomes
produits
Xa-Xa
Xw-Xa
Xa-Xb
Xw-Xb
Xa-Xc
Xw-Xc
Xa-Xd
Xw-Xd
Xa-Xe
Xw-Xe
Xa-Xf
Xw-Xf
Xa-Xg
Xw-Xg
Xa-Xh
Xw-Xh
Xa-Xi
Xw-Xi
allèles diff. 2 3 4 5 6 7 8 9 10
rapport 1/2 1/4 1/6 1/8 1/10 1/12 1/14 1/16 1/18
survi­vantes = ♀ 50% 75% 83% 87% 90% 92% 93% 94% 95%
éliminées 
♂ diploïdes
50% 25% 17% 13% 10% 8% 7% 6% 5%

Si la reine n’a pas d’allèle sexuel commun avec les mâles qui l’ont fécondée, on n’aura aucune élimination car tous les couples d’allèles sexuels de sa descendance seront « hétérozygotes ».  Cela n’arrive, bien sûr, que si la reine provient d’un environnement étranger à l’environnement du lieu de fécondation.

Les mêmes constatations représentées graphiquement faciliteront la compréhension.  Et ils donneront une image claire de la raison pour laquelle il est extrêmement difficile d’estimer le nombre possible d’allèles sexuels présents au delà du douzième ou du treizième.

Fig. 1.  Représentation graphique du nombre d’abeilles survivantes après l’éclosion de l’œuf, en fonction du nombre d’allèles sexuels dans une population.  La courbe verte est celle qui correspond à un état normal : deux allèles sont communs à la reine et à sa série de mâles.  La courbe bleue correspond à un cas particulier où un seul allèle est commun.  La surface au dessus des courbes correspond à la « perte de vitalité » par rapport à la fécondité naturelle de la reine.

Un raisonnement simple permet de conclure que le nombre d’allèles du site étudié est obtenu en divisant le nombre total de cellules examinées (100 ou 225) par le nombre de trous (larves éliminées) N, obtenu par comptage direct ou sur photo.  On prend pour valeur de l’environnement étudié la valeur la plus haute obtenue sur une série de reines élevées sur le site.  Bref, pour 15 trous sur 100, le nombre d’allèles serait 6-7 (100/15, soit ≅7).
Si un calcul minutieux des résultats de survie des larves dans un grand nombre de colonies modèles montre une élimination moyenne de 12,5% (en survie = 87,5%) cela indique qu’il y a 100/12,5 = 8 allèles sexuels dans la population.  Le grand nombre de mesures permet de diminuer l’influence des colonies provenant d’une reine où un seul des allèles sexuels est commun chez la reine (courbe bleue).

Allèles sexuels dans une souche ou lignée d’élevage.

Bien qu’il soit possible de calculer relativement bien le nombre d’allèles sexuels dans une population libre, il est par contre très difficile — et dans la pratique impossible —, de calculer ce nombre dans une souche d’élevage ou lignée.  La raison en est que le nombre de larves éliminées ne varie pas beaucoup d’une famille à l’autre dans une population libre d’une certaine taille, alors qu’elle varie très sensiblement dans une lignée, où les reines sont inséminées, ou appariées sur une station de fécondation isolée.

Le recours à l’insémination artificielle avec du sperme homogénéisé à partir d’un grand nombre de mâles, permettra d’obtenir des œufs fécondés combinés donnant une progéniture qui va dans le sens d’une économie de la population.  Mais si l’on utilise un nombre limité de mâles pour l’insémination ou la fécondation en station de fécondation isolée, où le nombre de ruches à mâles (RAM) est nécessairement réduit, cela donnera inévitablement de nombreux mâles avec les mêmes allèles sexuels.  Le nombre limité de cellules germinales différentes donnera alors de grandes variations dans les résultats des éliminations de juvéniles.  Et lorsque le calcul est aussi limité par la petite taille du groupe d’élevage, la moyenne ne peut être que mauvaise.

Suppléer à la diminution du nombre des allèles sexuels grâce à l’ajout de nouveau matériel d’élevage

En ajoutant par croisement une souche ou une lignée de « sang neuf » à des souches, de lignées ou même de race, on ajoute des gènes nouveaux ou on récupère d’anciens gènes perdus par érosion génétique — sélection basée sur trop peu de caractères.  Par la même occasion on introduit de nouveaux allèles sexuels.

Toute reine étrangère importée, comme toutes les autres reines, possède deux allèles sexuels dans toutes les cellules du corps.  De plus, sa spermathèque contient une sélection aléatoire d’allèles sexuels issus de la population dont elle vient.  Lors de l’apport d’une reine étrangère on obtient donc un nombre inconnu d’allèles sexuels nouveaux (au moins deux).  Chaque jeune reine fille portera deux de ces allèles sexuels.  Nous les feront s’accoupler sur notre propre station de fécondation, ou dans notre population.  La génération F1 fera ajouter deux allèles sexuels nouveaux (mais seulement s’ils n’étaient pas déjà présents).  La situation la meilleure est celle où la nouvelle reine est d’une race différente ou vient d’une zone éloignée, sans possibilité d’ancêtres communs.

Ajout de deux nouveaux allèles sexuels

On peut très facilement le vérifier cet ajout dans la colonie fille car, la coïncidence des allèles sexuels étant exclue, le nombre de larves éliminées et comptabilisées après douze jours devrait être nul.  Les allèles sexuels nouvellement acquis devraient se propager à d’autres lignées par l’utilisation des mâles fournis par ces reines-filles qui seraient tous porteurs de ces différents allèles.  Avant qu’ils ne disparaissent à nouveau par érosion.

La consanguinité

La variation génétique chez la descendance femelle et la survie des larves avec des liens de parenté différents.

Cas de l’insémination avec un seul mâle

Dans ce cas, les ouvrières filles et les jeunes reines seront évidemment des super-sœurs.  Car le sperme d’un seul mâle est génétiquement rigoureusement unique et ne dépend que de la mère.  Mais il peut y en avoir environ un million de différents pour une seule reine-mère.  Les filles (ouvrières ou jeunes reines dans cette colonie) seront plus étroitement liées que des frères et sœurs — chez les mammifères.  Concernant les allèles sexuels : deux cas sont possibles :

  • soit ♀ = Xa + Xb et ♂ = Xu   => 100% de survie
  • soit ♀ = Xa + Xb et ♂ = Xa ou Xb   => 50% de survie

Dans le cas d’une fécondation par un seul mâle, les larves auraient soit une survie de 50%, soit de 100%.  La probabilité d’avoir 50% est supérieure si l’on choisit le mâle dans la même zone, ou par exemple d’une proche parente (sœur ou cousine) de la reine inséminée.  Les chances de réussite (100% de survie) augmentent avec la diminution de la parenté.  Si l’on choisit la reine et ce mâle dans une population libre possédant 12 allèles sexuels différents, la probabilité de réussite (100% de survie) est de 91,7%.

Cas de l’insémination avec plusieurs mâles d’une même colonie …

… ou en utilisant sur une station de fécondation isolée la même colonie comme unique ruche à mâles (RAM).

Les mâles qui fécondent la reine, sont génétiquement tous différents, mais ils ne possèdent que deux allèles sexuels différents — les deux de leur mère.  Leurs spermes, mélangés dans la spermathèque, forment un ensemble semblable au sperme génétiquement varié d’un mammifère.  La progéniture femelle sera donc constituée de sœurs, même s’il apparaît des groupes de sœurs qui sont super–sœurs.  Sœurs car filles de la même mère et aussi filles de pères qui sont des frères.

Nous obtenons ici plus de variation génétique que dans le cas de l’insémination avec un mâle unique.  La survie des larvettes sera de l’ordre de 75%.  Ce n’est qu’exceptionnellement que l’on n’aura que 50% et on peut compter dans la pratique sur 75%.

Cas de l’insémination artificielle avec du sperme de mâles provenant d’un certain nombre de colonies dont les reines sont sœurs …

… ou par l’utilisation d’un certain nombre de reines sœurs sur une station de fécondation isolée :

Nous obtenons une progéniture, constituée de plusieurs groupes de super-sœurs : autant que le nombre de mâles différents ayant fécondé la reine.  Cependant, les groupes sont moins apparentés que des super-sœurs (même père).  Le patrimoine des mâles est le même pour tous — il vient de leur grand-mère — mais ce qu’ils ont reçu en héritage à travers leurs différentes mères n’est, bien sûr, pas génétiquement identique.  En effet, chacune des sœurs n’a reçu en héritage que la moitié du patrimoine venant de la grand-mère elle-même et seulement d’un seul de ses maris ; mais de celui-là, la totalité.  On voit donc qu’une fille individuelle d’une colonie ne reçoit que très peu du patrimoine exprimé par cette colonie

Le résultat est une plus grande diversité génétique.  Le nombre de survivantes après l’éclosion variera selon l’importance de l’affinité.  Lors d’une fécondation consanguine, où les reines des colonies à mâles sont des filles d’une sœur ou cousine de la reine à féconder, les survivantes dans un groupe de descendantes varient de 75 à 100%, et les colonies à 100% ne sont pas fréquentes.  Les colonies dont les survivantes sont entre 80 et 90% sont la majorité, difficiles à séparer en pratique.

Cas de fécondations au hasard avec des mâles plus ou moins apparentés

Toute la descendance femelle est groupée en demi-sœurs — pères différents — ou en super-sœurs — même père —.  La survivance à l’éclosion est généralement optimale.

Allèles sexuels et consanguinité lors de l’usage d’une station de fécondation isolée.

On suppose généralement que six colonies à mâles ayant du répondant sont suffisantes sur une station de fécondation isolée.  Or, cette hypothèse est probablement fausse !  Il faut considérer deux points de vue pour choisir le nombre requis de colonies à mâles sur une station isolée.

  1. Le point de vue du nombre d’allèles sexuels à garder.
  2. Le point de vue de l’ampleur du patrimoine à transmettre.

Point de vue du nombre d’allèles sexuels

Même dans le cas d’une combinaison entre des lignées tout à fait étrangères (pas d’ancêtres communs) ou entre races différentes, certains allèles sexuels seront inévitablement perdus à la suite d’accouplements sur une station de fécondation isolée.
Il n’est pas possible de faire en sorte que tous les allèles sexuels que peut contenir une race ou une lignée soient tous représentés sur la station (ou en insémination) dans un nombre limité de colonies à mâles.  Mais nous devons être tout à fait conscients qu’en utilisant un trop petit nombre de ces colonies, la perte de ces allèles sexuels devient très dommageable.

Partie du patrimoine génétique récupéré en fonction du nombre de RAM :

Fig. 1.  Calcul du nombre d’allèles sexuels présents sur une station de fécondation isolée, par l’utilisation d’un nombre croissant de colonies à mâles.  On a calculé pour un nombre d’allèles sexuels différents, présents au départ dans les souches supposées (4, 6, 8, 10, 12 & 14).  En ordonnée, on a la probabilité de récupérer les allèles envisagés.  Il est manifeste que si l’on ne se considère que dans les cas les plus simples de 4, 6 et 8 allèles à transmettre, il faut respectivement au moins 6, au moins 12 et au moins 18 RAM pour espérer tout récupérer dans la descendance.  Les danois en utilisent systématiquement 12.  Les gestionnaires de stations bien connues en Allemagne et Hollande en utilisent généralement bien plus que 20.

Le point de vue de l’ampleur du patrimoine à transmettre en héritage

Il est bien évident que les reines d’une fratrie ne reçoivent de leur mère qu’une petite partie de son potentiel : la moitié de ses gènes à elle, hérités de ses parents plus tous les gènes d’un seul de ses « maris ».  Bien loin de l’ensemble du patrimoine de la colonie-mère.
Il est bien évident aussi que les mâles de valeur, s’accouplant aux reines, filles de la colonie-père, ne jouent pas de rôle génétique dans la production des mâles des RAM.  Deux œufs ne sont jamais identiques, des sœurs sont toutes différentes et l’héritage transmis par elles (par leurs mâles aussi tous différents) ne sera jamais le même.
L’ampleur de l’héritage transmis de la colonie-père augmente donc avec le nombre de mâles provenant de RAM différentes et fécondant une même reine.  En même temps, la composition totale du sperme reçu par chaque jeune reine tend à s’uniformiser en augmentant.  Cela diminue les variations d’héritage reçu par chacune des reines fécondées sur la station.  Il résulte de ces considérations que c’est par la colonie-père et non depuis la colonie-mère que la transmission des caractères sera la plus complète.

Le corollaire évident est qu’une fratrie nécessite toujours une sélection ultérieure, certaines descendantes manquant des caractères réellement nécessaires.  Une élimination effective des variantes n’est pas possible dans le cas de reines fécondées librement et il est déconseillé d’utiliser simplement les reines-filles d’une fratrie en tant que RAM, telles quelles.  L’approche la plus sûre consiste à sélectionner les RAM au printemps parmi les restantes d’une fratrie complète importante, déjà testées l’année précédente.

Publié en danois dans
Krydsnings- og kombinationsavl
med honningbien
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1996, p. 40-43
Cours d’élevage des reines,
par Hans Røy,
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février 2013,
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